Dans un jugement séléctionné par Monsieur Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public, pour publication dans la Revue Juridique Politique et Economique de Nouvelle-Calédonie (RJPENC, 2017-1), le Tribunal Administratif de Nouvelle-Calédonie a confirmé le caractère d’intérêt général du double contrôle de l’eau de consommation en Nouvelle-Calédonie (TA Nouvelle-Calédonie, 16 février 2017, N°1600168).
Un marché public passé par l’agence sanitaire de la Nouvelle-Calédonie avait attribué la totalité des marché de contrôle de l’eau potable à la société Calédonienne des Eaux, alors que l’appel d’offres précisait que seules les candidats n’intervenant pas dans la distribution de l’eau pouvait opérer les contrôles de qualités objet du contrat. Toutefois, cette règle, qui a pour but de maintenir un double contrôle de la qualité de l’eau, n’a pas d’origine légale ou règlementaire en Nouvelle-Calédonie. La société candidate Lab’eau (représentée par le Cabinet Plaisant) mettait notamment en exergue le fait que la règle du double-contrôle était essentielle pour garantir une eau de consommation de qualitée et exempte de risques sanitaires.
Il revenait donc au juge de décider si le gouvernement pouvaient enfreindre une règle qu’il s’était contraint à suivre lui-même, mais qui n’avait pas de valeur contraignante.
Le Tribunal administratif annula le marché litigieux en retenant que la règle fixée par le gouvernement dans son appel d’offres permettait de poursuivre un but d’intérêt général impérieux et devait être respectée.
Le Tribunal explique: « 18. Toutefois, compte tenu de l’impérieux motif d’intérêt général lié à l’indépendence du contrôle de la qualité de l’eau destiné à la consommation humaine et à l’absence total d’autocontrôle, les dispositions précitées de l’article 6 du règlement particulier d’appel d’offres portent une atteinte mesurée et strictement proportionnée au principe d’égal accès à la commande publique. En effet, en empêchant tout autocontrôle, même anonyme, ces dispositions préviennent les conflits d’intérêts et empêchent la redondance des erreurs qui pourraient résulter de la simple utilisation du même matériel ou des mêmes modes opératoires pour l’analyse des échantillons d’eau.
21. Eu égard à la gravité des vices retenus qui ont eu pour objet et pour effet de favoriser l’un des deux candidats à l’attribution de la convention, l’irrégularité du marché public en litige ne peut-être régularisée. La Nouvelle-Calédonie soutient à bon droit que l’annulation du marché aurait d’importantes conséquences sur l’intérêt général compte tenu de la nécessité de procéder à des analyses régulières de contrôle de la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine. (…) Eu égard à la nécessité de garantir la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine, il y a lieu de résilier ce marché dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement.
24.(…) la société Calédonienne des Eaux ne pouvait se voir attribuer le marché pour les communes où elle exerce une activité de distribution de l’eau potable, soit les communes de Nouméa, Païta, Dumbéa, Mont-Dore, Boulouparis et La Foa en province Sud, qui représentent la grande majorité de la population de cette province, et plusieurs grandes communes de la province Nord, représentant également la majeure partie de la population, où la société Aqua Nord exerce la même activité avec la collaboation technique de la société Calédonienne des Eaux.
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